Partout en Europe, y compris dans les territoires qui resteront ensuite durablement attachés à l’Église romaine, la naissance et la diffusion des protestantismes s’accompagnent de la multiplication de gestes iconoclastes. Les images deviennent ainsi très vite, dès les années 1520-1530, l’un des enjeux et l’un des moyens de la fracture confessionnelle et l’affirmation des identités religieuses rivales. Mais pour rendre compte de cette dynamique, il faut renoncer à tenir les iconoclastes ordinaires – ceux qui renversaient les croix de Calvaires, décapitaient les Vierges au coin des rues, pénétraient dans les églises avec des masses, des bâtons et des cordes pour faire chuter les idoles – pour les exécutants plus ou moins informés d’un programme théorique et théologique précis qui aurait été formulé par les Réformateurs comme Luther ou Calvin. Il faut tenter, au contraire, de saisir les logiques spécifiques de leurs pratiques de la violence symbolique en regardant au plus près ce que faisaient véritablement les acteurs si dissemblables dans ces événements décisifs pour le sort religieux de l’Europe Occidentale.
En savoir plus
Une révolution symbolique : l’iconoclasme huguenot et la reconstruction catholique, Paris, Éditions de Minuit, 1991.
La paix de religion. L’autonomisation de la raison politique au XVIe siècle, Paris, Le Seuil, 1997.
« Le roi idole ? Iconoclasme protestant et pensée monarchomaque » in G. BUTI et A. CAROL (eds), Comportements, croyances et mémoires. Europe méridionale XVe-XXe siècle. Études offertes à Régis Bertrand, Presses Universitaires de Provence, p.171-182, 2007.